Mars

Asperge

Plante dioïque, de la famille des liliacées et du genre dont elle porte le nom ; c'est une plante qui produit un gros rhizome vivace, appelé vulgairement griffe ou patte, duquel s'élèvent des tiges annuelles, rameuses, hautes de i mètre et plus, munies de très petites feuilles ; les fleurs sont petites, blanchâtres ; il leur succède (sur les pieds femelles) de petits fruits rouges, pisiformes, qui contiennent les graines.

Les parties comestibles de l'asperge sont ses jeunes tiges, lorsqu'elles n'ont encore que de 6 à 12 centimètres de longueur au-dessus de terre.

Observations — Les maraîchers de Paris ne faisant de l'asperge qu'en culture forcée, leur manière de la planter devra paraître différente de celle généralement suivie dans les jardins potagers.

Culture — Dans le courant de mars, on laboure une planche en bonne terre meuble qui ne soit ni à l'ombre, ni dans un endroit trop chaud, et on y sème à la volée la graine d'asperge dite de Hollande, de Marchiennes, ou enfin de la plus belle espèce possible ; on la herse pour l'enterrer, et on répand sur la planche l'épaisseur de 5 centimètres de terreau. Tandis que les jeunes plantes poussent, on les désherbe au besoin, et, si l'été est sec, quelques bonnes mouillures leur seront très utiles.

Après un an de semis, le plant est bon à planter ; alors, au mois de mars, on fait une fosse large de 1 mètre 33 centimètres, profonde de 40 centimètres, en jetant la terre d'un côté ; on met 20 centimètres d'épaisseur de fumier de vache bien pressé dans le fond de la fosse et on le couvre de 8 centimètres de la meilleure terre tirée de la fosse, que l'on tasse bien avec les pieds, ensuite on y passe le râteau.

Cette opération étant faite, on arrache l'asperge semée un an auparavant ; les griffes ont les racines entremêlées les unes dans les autres, on les sépare et on en place quatre rangs sur la terre qui est dans la fosse, laquelle a 1 mètre 33 centimètres de largeur et une longueur à volonté ; mais il faut que les deux rangs des côtés soient à 16 centimètres du bord, parce que, en vieillissant, l'asperge s'étendrait dans le sentier, ce qui serait un inconvénient au moment de la chauffer. En laissant 16 centimètres de chaque côté, il ne reste plus que 1 mètre pour planter quatre rangs d'asperges, ce qui met les rangs à 24 centimètres l'un de l'autre, et, pour augmenter la distance d'un pied à l'autre, on les place en échiquier, en laissant un espace de 40 centimètres entre chaque pied dans les rangs, et on recouvre le tout de 8 à 10 centimètres de terre.

La distance des rangs et des pieds entre eux étant ainsi calculée, on procède à la plantation ; on prend une griffe, on la pose à la place indiquée sur la terre préparée, en étendant bien les racines à la circonférence, et on la fiye dans cette position en mettant une poignée de terre dessus. Quand toute la fosse est plantée, on la remplit avec la terre qu'on en avait tirée, en la tenant un peu plus haute ; car le fumier qui est dans le fond doit baisser en se pourrissant, et il faut que les fosses se trouvent, par la suite, au niveau des sentiers[1] : alors il y aura environ 8 ou 10 centimètres de terre sur les griffes.

Après que cette première fosse est plantée et comblée, on en ouvre une pareille à côté, à 66 centimètres de distance, on la plante de même, et ainsi de suite, jusqu'à ce que le carré soit planté, en laissant toujours un sentier large de 66 centimètres entre chaque fosse.

Quand tout le carré est ainsi planté, on laisse l'asperge croître et se fortifier pendant deux campagnes, en ayant soin seulement de n'y pas laisser venir de mauvaise herbe, de tenir le carré propre et de donner un très petit labour, plutôt à la fourche qu'à la bêche, en mars, la seconde année.

Si le plant était bon, si la plantation a été bien faite, à l'automne de la seconde année, on jugera, à la grosseur des tiges de l'asperge, qu'elles sont assez fortes pour être forcées en novembre[2].

Manière de forcer l'asperge blanche — Dans la première quinzaine de novembre, on creuse les sentiers du carré d'asperges sur 66 centimètres de largeur et autant de profondeur ; on met de cette terre bien divisée l'épaisseur de 18 à 22 centimètres sur les planches d'asperges, afin de les faire allonger, et le reste se dépose au bout des sentiers. Quand ces sentiers sont vides, on les emplit de bon fumier neuf de cheval, arrangé et bien tassé comme quand on fait une couche ; on place les coffres sur les planches d'asperges ; on étale bien la terre qu'on a déposée sur les planches ; on remet encore du fumier neuf dans les sentiers jusqu'au bord supérieur des coffres ; on creuse de pareils fossés au bout des planches, qu'on emplit également de fumier. Plusieurs maraîchers emplissent aussi les coffres de fumier neuf, avant de placer les châssis, dans le but d'échauffer le dessus de la terre en même temps que le fumier des sentiers en échauffe les côtés : enfin, les châssis étant posés, on les couvre de litière sèche ou de paillassons, afin que la chaleur qui va se manifester dans la terre ne s'évapore pas en pure perte ; on remet même encore du fumier dans les sentiers pour l'élever plus haut que le bord supérieur des coffres.

Quinze ou vingt jours après, les asperges commencent à sortir de terre ; ceux des maraîchers qui ont empli les coffres de fumier le retirent pour laisser la terre à nu et recouverte seulement de châssis, afin de voir les asperges pousser ; mais il faut, toutes les nuits, couvrir les châssis de paillassons simples ou doubles, selon le degré de froid qui peut survenir. On cueille les asperges quand elles sont longues d'environ 8 centimètres au dehors de terre ; voici comme on doit s'y prendre : on fouille avec la main, en retirant la terre au pied de l'asperge et en prenant garde de casser ou blesser celles qui ne sont pas encore sorties de terre ; en fouillant et en retirant la terre à plusieurs fois, on finit par dégager l'asperge sur une longueur d'environ 20 centimètres ; alors on la saisit tout à fait dans le bas avec la main, on la tire fort en tordant très légèrement, et elle se détache de la griffe ou rhizome à plusieurs centimètres au dessous de l'endroit que l'on tient ; de sorte qu'une belle asperge, qui vient d'être cueillie, doit avoir environ 24 centimètres de longueur.

On appelle des asperges ainsi forcées asperges blanches, parce qu'elles ont, en effet, beaucoup plus de blanc que celles qui viennent, au printemps, à l'air libre. On peut cueillir l'asperge blanche tous les deux jours et pendant deux mois ; après ce temps, on cesse la cueillette pour ne pas épuiser et affaiblir le plant. Si donc on voulait avoir de l'asperge blanche tout l'hiver, il faudrait diviser un carré d'asperges en trois lots et les réchauffer successivement à cinq ou six semaines de distance.

Il ne faut pas oublier qu'un plant d'asperges qui a été forcé l'hiver ne doit pas être cueilli derechef au printemps, sous peine de le voir épuisé très promptement.

Nous venons de dire qu'on peut cueillir l'asperge blanche pendant deux mois ; mais c'est à condition qu'on entretiendra la chaleur dans les réchauds ou le fumier qui entoure les planches d'asperges. La pratique apprend à juger quand ce fumier a perdu sa chaleur ; on s'en aperçoit quand les asperges ne croissent plus avec la rapidité voulue, qu'elles ne sont plus aussi fraîches, qu'elles ont quelques taches de rouille : alors il faut se hâter de remanier le fumier des sentiers, en y mélangeant moitié de fumier neuf ou même davantage, et il peut être nécessaire de renouveler cette opération deux ou trois fois pendant les deux mois que dure la cueillette.

La cueillette finie, on enlève les coffres et les châssis de dessus les planches d'asperges ; on enlève également le fumier des sentiers et on y remet la terre qu'on en avait tirée, dont partie avait été déposée sur les planches pour augmenter la longueur des asperges, et partie déposée au bout des sentiers. En faisant descendre dans les sentiers la terre qui avait été déposée sur les planches, on trouve des asperges plus ou moins avancées et qui ne se montraient pas encore au-dessus de terre : ces asperges ne sont pas propres à la vente ; mais la jardinière les met à profit dans sa cuisine. Les asperges se vendent à la botte, et une botte a, de tour environ 40 centimètres.

Pour avoir de belles asperges et ne pas trop fatiguer les griffes, on ne doit les chauffer qu'une fois en deux ans ; cependant il y a des maraîchers qui tes chauffent deux ans de suite et les laissent reposer seulement la troisième année.

Manière de forcer l'asperge verte ou aux petits pois — Ce ne sont pas les maraîchers de Paris qui sèment et élèvent cette asperge ; ce sont les cultivateurs des environs de la capitale qui l'élèvent en plein champ, aux Vertus, à Saint-Denis, à Saint-Ouen et ailleurs, en immense quantité : après un an de semis, ils la plantent et la cultivent, pendant trois ans, sans la cueillir ; ensuite ils la cueillent chaque année, selon l'usage, et c'est quand ces asperges sont dans leurs premières années, ou qu'elles ont d'un à six ans de plantation, ou qu'elles sont dans leur plus grand rapport, que les maraîchers qui forcent l'asperge vont l'acheter. L'asperge qui n'a qu'un an ou deux de plantation se vend de 800 fr (3200 €) à 900 fr (3600 €) le demi-hectare, tandis que celle qui a cinq ou six ans de plantation ne se vend que de 300 fr (1200 €) à 400 fr (1600 €) et 500 fr (2000 €) le demi-hectare ; et, comme le maraîcher est fort intéressé à ce que l'asperge soit bien levée, c'est ordinairement lui et ses hommes qui vont l'arracher.

On peut forcer l'asperge verte depuis le mois d'octobre jusqu'à ce que les asperges de pleine terre donnent. Voici la manière de la forcer: On fait des couches larges de 1 mètre 60 centimètres, épaisses de 54 à 64 centimètres, appuyées l'une contre l'autre, avec deux tiers de bon fumier d'auberge, bien imbibé d'urine, et d'un tiers de fumier ordinaire, bien mêlés ensemble, et on place dessus des coffres hauts de 40 à 50 centimètres par derrière, et de 32 à 35 centimètres par devant. Quand le coup de feu est passé, on prend des griffes d'asperge, on les place debout sur leurs racines, sur le fumier de la couche, en pressant les griffes et leurs racines les unes contre les autres, de manière que toutes les griffes soient à la même hauteur et qu'il en tienne de 450 à 500 sous chaque panneau. Quelques maraîchers font glisser un peu de terreau entre chaque griffe ; d'antres n'y placent rien ; enfin, à mesure que l'on exécute cette sorte de plantation, on place les châssis dessus, et on couvre avec des paillassons en raison du froid. L'humidité chaude du fumier ne tarde pas à s'élever dans les racines et entre les griffes de l'asperge, à former une atmosphère chaude sous les châssis, à pénétrer toutes les griffes et à les mettre en végétation ; alors les boutons des griffes, qui ne devaient s'allonger qu'en avril ou mai, stimulés par la chaleur et l'humidité, s'allongent successivement et rapidement ; mais leurs jets sont beaucoup plus minces que si les griffes n'eussent pas été arrachées de terre.

Quoique les coffres à forcer l'asperge verte soient plus hauts que les autres, quand l'asperge commence à pousser, il faut mettre des bouchons de paille sous les coffres, pour que le verre des châssis se trouve à 33 centimètres du sommet des griffes, car beaucoup d'asperges ont une longueur de 28 à 32 centimètres lorsqu'on les cueille ; mais en même temps qu'on élève les coffres, il faut remplir les sentiers de fumier jusqu'au haut des coffres, tant pour empêcher l'air extérieur de pénétrer jusqu'aux asperges que pour y entretenir la chaleur : si même, pendant la cueillette, on s'apercevait que la couche ne fournît plus assez de chaleur, on devrait remanier et mélanger du fumier neuf avec l'ancien dans les sentiers, une ou deux fois.

Quinze jours après que les griffes sont placées sur couches et sous panneaux, ou commence à cueillir des asperges, si la chaleur a été bien entretenue, et elles peuvent en produire pendant six semaines, qui est à peu près le temps nécessaire pour que tous les yeux des griffes soient épuisés, et, pendant ce temps, on peut cueillir des asperges vertes tous les deux ou trois jours ; mais lés dernières cueilles sont moins abondantes et les asperges sont moins grosses que les premières. Une griffe peut produire, terme moyen, dix asperges Vertes, et, comme un panneau peut contenir de quatre cent cinquante à cinq cents griffes, il en,résulte qu'on peut cueillir aussi de quatre mille cinq cents à cinq mille asperges vertes sous un panneau de châssis.

Cette asperge se vend par bottes de 52 centimètres de tour, sous les noms d'asperge verte ou d'asperge aux petits pois, parce qu'on la mange le plus souvent cassée en petits morceaux qui imitent assez des pois verts : les griffes qui l'ont produite sont rejetées par les maraîchers de Paris, parce qu'ils n'ont pas le temps ni le besoin du les faire consommer en terreau.

La culture de asperge verte, aussi bien que celle de l'asperge blanche, est très dispendieuse ; aussi n'y a-t-il qu'un très petit nombre de maraîchers de Paris qui la cultivent, encore y a-t-il des années où ils en retirent à peine leurs frais.

Aubergine ou mélongine

Plante de la famille des solanées et du genre solanum, originaire des pays chauds. Elle est annuelle, s'élève une tige haute d'environ 45 centimètres, rameuse, garnie de grandes feuilles ovales, tomenteuses ; ses fleurs sont bleuâtres et leur calice est aiguillonné ; à ces fleurs succèdent des fruits gros, pendants, charnus, oblongs, violets ou jaunâtres, qui sont la seule partie comestible de la plante.

Culture — Dès les premiers jours de mars, ou même dès la fin de février, on monte une couche mère à un panneau, on place dessus un petit coffre dans lequel on répand 8 centimètres de terreau, que l'on couvre d'un châssis sur lequel on déroule un ou deux paillassons pour accélérer la fermentation. Quand le coup de feu est passé, on sème la graine d'aubergine sur le terreau et on l'en recouvre de i centimètre. La graine d'aubergine, ainsi semée, lève en quatre jours. En attendant que le plant se fortifie, on prépare une couche pépinière à deux ou trois panneaux, et, huit ou dix jours après, on y repique le plant, de manière qu'il en tienne cent cinquante sous chaque panneau. On ombre si le soleil luit avant que le plant ne soit repris, on le couvre, la nuit, avec des paillassons et on fait un accot autour de la couche pour y maintenir la chaleur.

L'aubergine grandissant assez lentement, le plant d'un seul. semis suffit pour en faire deux plantations, à un certain temps l'une de l'autre : ainsi, si l'on a des couches vides au commencement d'avril, on en laboure le terreau et on y plante des aubergines à quatre pieds par panneau, si la couche est à châssis ; ou bien, si la couche est à cloches, on y plante deux rangs et les pieds à 66 centimètres dans les rangs. Dans les deux cas, on arrose le plant de suite pour l'attacher à la terre : dans le premier cas, il faut placer de suite les châssis et ombrer pendant la reprise ; dans le second cas, il faut placer une cloche sur chaque plant et l'ombrer pour la même raison, et préserver du froid par les moyens connus.

L'aubergine demande des arrosements fréquents pendant sa croissance. Après le 15 mai, les gelées n'étant plus à craindre, on enlève les châssis et les cloches, et, si la plante n'a pas manqué de mouillures nécessaires, elle pourra donner des fruits bons à être livrés à la consommation à la fin de juin et dans le courant de juillet. L'aubergine, cultivée ainsi sur couche, donne de plus beaux fruits que celle cultivée en pleine terre, à condition pourtant que la mouillure ne lui manquera pas.

La seconde manière de cultiver l'aubergine est d'attendre jusqu'au 15 ou 20 avril pour planter le plant en pleine terre, dans une côtière ou dans un endroit abrité, de couvrir chaque plant d'une cloche, qu'on soulèvera à propos, avec une crémaillère, pour donner de l'air, et qu'on n'ôtera définitivement qu'à la fin de mai : alors on forme un petit bassin autour du pied de chaque plante, on y répand un paillis et on mouille souvent et abondamment.

La culture de l'aubergine est fort restreinte à Paris, et peu de maraîchers s'en occupent, parce que le débit en est petit et peu sûr.

Tomate ou pomme d'amour

Plante de la famille des solanées et du genre solanum, originaire de l'Amérique méridionale. Elle est annuelle, rameuse, diffuse, s'élève à la hauteur de plus de 1 mètre au moyen d'un soutien, est munie de feuilles ailées, incisées, et a des fleurs petites, d'un blanc sale, disposées en grappes simples, auxquelles succèdent des fruits rouges, arrondis, toruleux, succulents, qui sont la seule partie comestible de cette plante. Il y a plusieurs variétés de tomate, mais nous ne cultivons que celle à fruit rouge et toruleux.

Culture — La graine de tomate se sème à la fin de mars ; on a rarement besoin de faire une couche mère pour cela, car à cette époque on ne manque pas de couches veuves ou remaniées qui ont assez de chaleur, et on trouve toujours sur quelqu'une la place suffisante pour semer deux ou trois clochées de graine, quantité plus que suffisante pour le plus fort maraîcher. Quand la graine est levée et que les plantes sont hautes de 5 on 6 centimètres, on les repique sur une autre couche tiède sous cloche ou sous châssis ; on peut en mettre douze pieds sous une cloche, et deux cents sous un panneau de châssis ; on arrose et on ombre de suite ; deux ou trois jours après, on rend la lumière, on donne de l'air et on l'augmente successivement jusqu’au premier mai : si alors le temps est doux, on peut enlever les cloches et les châssis, mais ne pas les éloigner, afin qu'on puisse les remplacer à la moindre apparence de gelée, car la tomate y est très sensible. Après le 15 de mai, on n'a plus ordinairement de gelée à craindre, alors il est temps de la planter 4 demeure. et à l'air libre.

Les maraîchers qui ont semé la graine de tomate au commencement de mars la plantent sur vieille couche, sur deux rangs et à \pieds{2} de distance dans les rangs. Ceux des maraîchers qui ont semé à la fin de mars plantent en plein carré ou en côtière, en plaçant les pieds à au moins 66 centimètres l'un de l'autre ; si on plante en plein carré, on peut planter quatre rangs dans une planche de 2 mètres 33 centimètres de large, et mettre les pieds en échiquier dans les rangs à 1 mètre l'un de l'autre. Quant à la plantation en elle-même, elle ne réclame rien de particulier ; on mouille le pied aussitôt qu'il est en terre, et il se défend lui-même du soleil.

Les tiges de la tomate sont faibles, ne s'élèvent pas naturellement d'elles-mêmes, et elles se ramifient à la base ; alors, quand elles sont longues de 40 centimètres, on choisit deux ou trois des plus vigoureuses branches, et on supprime toutes les petites pousses qui sont au dessous d'elles et sur leur longueur ; puis on fiche un bon tuteur de 1 mètre de haut à chaque pieds, et on y attache avec un brin de paille les tiges préparées de tomate : ces tiges continuent de pousser, et on leur donne un second, un troisième lien, jusqu'à ce qu'elles soient hautes comme le tuteur ou d'environ 1 mètre ; alors on les arrête en leur coupant la tête : les rameaux latéraux se fortifient, grandissent ; mais on les arrête aussi à une certaine longueur, et les fleurs se montrent.

Tant que la tomate n'a pas de fruits, on ne l'arrose que modérément, afin qu'elle ne pousse pas trop à bois et qu'elle soit mieux disposée pour la fleur ; mais, quand les fruits sont noués, on doit l'arroser abondamment pour les faire grossir, et on continue de supprimer tout ce qui s'élève au-dessus des tuteurs.

Les tomates plantées sur couche donnent des fruits mûrs dans la première quinzaine de juin ; mais celles plantées en pleine terre ne commencent à en donner qu'à la fin de juin et continuent d'en donner en juillet, en août et même jusqu'aux gelées si l'on veut. On cueille les tomates lorsqu'elles sont bien rouges ; les premières se vendent à la douzaine et les autres au calais.

Observations — Nous venons de dire comment les maraîchers cultivent les tomates ; mais nous n'ignorons pas que quelques personnes les attachent contre un treillage, les palissent contre un mur, contre un brise-vent, et qu'il y en a d'autres qui les laissent venir à volonté ; cela vient de ce que la tomate est une plante très fertile et que, de quelque manière qu'on la cultive, on en obtient toujours beaucoup de fruit.

Il ne paraîtra pas déplacé que nous notions ici que la tomate se greffe parfaitement en herbe sur les tiges de la pomme de terre, ce qui produit une double récolte dans le même espace de temps et de terrain ; car, quand les fruits de la tomate sont récoltés, on fait dans la terre une autre récolte de pomme de terre.

Perce-pierre (Criste marine)

Plante de la famille des ombellifères, de la section des sésélinées et du genre dont elle porte le nom. C'est une plante indigène, vivace, à tige herbacée, rameuse, haute d'environ 30 centimètres, charnue ainsi que ses feuilles, qui sont deux fois ailées, à folioles linéaires ; les fleurs sont petites, blanchâtres, terminales, et il leur succède de petits fruits ovoïdes et striés ; les feuilles et les jeunes tiges sont employées dans la fourniture de salade et avec les cornichons confits au vinaigre.

La culture de cette plante est très bornée, et on ne la trouve que chez très peu de maraîchers : on peut la semer en mars au pied d'un mur, au levant ou au couchant ; ses racines entreront dans le mur, et pousseront des tiges, des feuilles et des fleurs tous les ans : on peut aussi la semer en bordure comme l'estragon, et elle vivra également longtemps ; on en cueille les feuilles et les jeunes, tiges de la même manière.

Piment

Plante de la famille des solanées et du genre dont elle porte le nom. Elle est originaire des Indes, et fut introduite en Europe il y a environ deux cents ans. Il y a plusieurs espèces et variétés de piment ; mais les maraîchers, et en très petit nombre, ne cultivent que le piment à gros fruit ou corail, qui est une plante annuelle, rameuse, haute de 40 à 50 centimètres, munie de feuilles oblongues, nombreuses, de fleurs petites et d'un blanc verdâtre, auxquelles succèdent des fruits longs d'environ 8 centimètres, d'un très beau rouge, employés comme condiment en cuisine.

Piment corail

Dans le courant de mars, on sème une pincée assez claire de cette graine, sur un bout de couche tiède, et, quand le plant est haut de 8 à 18 centimètres, on le plante en motte sur le bord d'une autre couche à 40 ou 50 centimètres de distance : on pourrait le planter en pleine terre, mais il ne viendrait ni aussi vite, ni aussi bien que dans le terreau d'une couche ; il demande beaucoup d'eau, et ses fruits rougissent et mûrissent successivement depuis le mois d'août jusqu'aux gelées.

Arroche

Plante de la famille des chénopodées et du genre arroche. C'est une plante annuelle, originaire de l'Asie, haute de 1 à 2 mètres, peu rameuse, à fleurs insignifiantes, auxquelles succèdent de petits fruits enfermés dans le calice. Les parties comestibles de cette plante sont ses feuilles jeunes, triangulaires, assez grandes.

Bonne-dame ou belle-dame des jardins

Cette plante a fort peu d'importance en culture maraîchère. Fin de mars ou dans les premiers jours d'avril, on jette quelques graines dans les planches des autres semis et plantations, et elle vient sans qu'on s'en occupe : quand elle est haute de 12 à 15 centimètres, on l'arrache, on lui coupe le bas de la tige, on la met par bottes et on l'envoie à la halle ; ou bien, on laisse grandir la plante, on en cueille les feuilles une à une et on les vend en mannette. Il y a une variété à tige et feuilles rouges tout aussi bonne et qui ne demande pas plus de soin ; quand l'une et l'autre sont introduites dans un jardin et qu'on les y laisse grener, elles s'y reproduisent d'elles-mêmes plusieurs années de suite.


[1] Il y a plusieurs autres manières de planter l'asperge, surtout lorsqu'on ne doit pas la forcer et que l'on veut qu'elle produise pendant une vingtaine d'années ; ainsi on la plante plus profondément : on plante l'asperge sur de petits cônes de terre afin que ses racines soient à peu près perpendiculaires, qui est la direction qu'elles prennent naturellement par la suite ; on ne remplit les fosses que peu à peu pendant trois ans ; mais nous, nous ne demandons à l'asperge qu'une existence d'une douzaine d'années et la plantons plus jeune et plus près que ceux qui ont beaucoup de place à lui donner.

[2] Beaucoup de personnes laissent l'asperge croître en liberté pendant trois ans et ne commencent à les couper qu'à la quatrième année de plantation ; mais nous autres ne pouvons pas attendre aussi longtemps : nous les coupons à leur troisième pousse.