Avril

Pimprenelle

Plante de la famille des rosacées, tribu des sanguisorbes et du genre poterium. C'est une petite plante vivace, indigène, à feuilles composées, radicales, et dont la tige ne s'élève qu'à 5 décimètres ; divisée au sommet, chaque division terminée par une boule de fleurs monoïques, auxquelles succèdent de petites graines tétragones. Les parties comestibles de cette plante sont ses feuilles, dont on fait usage dans les garnitures des salades.

Culture — Cette plante est cultivée en très petite quantité par les maraîchers de Paris, parce que sa consommation est fort minime : on la sème en planche ou en bordure dans le courant d'avril ; quand elle est recouverte de quelques millimètres de terre, on met, par-dessus, un léger paillis, et on arrose au besoin. Quand les feuilles sont hautes de 12 à 15 centimètres, on les coupe près de terre et on les vend par petites bottes. Aussitôt que les feuilles sont coupées, on donne une bonne mouillure aux plantes pour les déterminer à en repousser d'autres promptement, et on les arrose de temps en temps si la saison est sèche.

La pimprenelle n'est pas difficile sur le terrain ; mais, pour que ses feuilles conservent un vert frais, appétissant, il faut la semer à l'ombre ou demi-ombre.

Estragon

Plante de la famille des composées, de la section des arthémidées et du genre arthémise. C'est une plante vivace, originaire de la Tartarie, à racines traçantes, à feuilles linéaires, lancéolées, et dont les tiges s'élèvent à la hauteur d'environ 40 centimètres ; les fleurs sont très petites et insignifiantes.

Les jeunes tiges et les feuilles tendres sont les seules parties comestibles : on les emploie dans les garnitures des salades.

Culture — On sème l'estragon à la volée dans un bout de planche en avril, et, quand ses jeunes tiges sont hautes de 16 à 20 centimètres et bien garnies de feuilles ; on les coupe près de terre, on les réunit par petites bottes et on les porte à la halle. Après cette première coupe, on arrache les pieds et ou les replante en planche : on en peut mettre dix rangs dans une planche large de 2 mètres 33 centimètres, et les pieds à 27 centimètres l'un de l'autre dans les rangs. Ailleurs, l'estragon se plante le plus souvent en bordure ; mais les maraîchers de Paris ne peuvent rien planter en bordure. Il vaut mieux planter l'estragon à mi-ombre qu'au grand soleil : pendant l'été on peut le cueillir tous les quinze jours, et il peut rester trois ans en place ; mais, comme il trace beaucoup, qu'il tend toujours à sortir des rangs, on l'arrache au bout de trois ans pour le replanter ailleurs. Cette plante ne tient qu'un très petit rang dans la culture maraîchère.

Cresson alénois

Plante de la famille des crucifères, de la section des lépidinées et du genre thlaspi. La plante est annuelle, d'une patrie inconnue, à petites feuilles très découpées, à tige haute de 2 à 3 décimètres, portant des grappes de petites fleurs blanches auxquelles succèdent de petites siliques orbiculaires échancrées au sommet. Les parties comestibles de cette petite plante sont les feuilles inférieures qui entrent dans la composition des salades.

Culture — Nous distinguons et nous cultivons dans nos marais, en très petite quantité cependant, le cresson alénois simple et le double, c'est-à-dire celui qui n'a pas les feuilles frisées et celui qui les a frisées : on sème la graine en pleine terre les derniers jours d'avril ou les premiers jours de mai, en rayon plutôt qu'à la volée, afin d'en rendre la cueillette plus facile, et on la couvre d'une légère couche de terreau ; cette graine lève très promptement, et, comme la plante croît excessivement vite, la gelée pouvant l'atteindre, on prend quelques précautions pour l'en garantir dans cette première saison. Quand les feuilles ont 8 ou 10 centimètres de haut, on les coupe pour la vente : la plante en repousse d'autres qu'on peut cueillir une seconde fois ; mais c'est tout. La plante monte en graine ; alors on la laisse grener si on en a besoin, autrement on la détruit. Cette petite plante croissant vite et durant peu, il faut en semer tous les dix ou douze jours pendant l'été.

Avant que le cresson de fontaine parût sur les marchés de Paris, pendant douze mois de l'année nous semions du cresson alénois sur couche dès le commencement de mars, comme primeur ; mais, à présent, il n'y aurait aucun profit à le faire.

Oseille

Plante de la famille des polygonées et du genre dont elle porte le nom. Il y a beaucoup d'espèces de ce genre, toutes vivaces et plus ou moins acides ; celles cultivées ont les feuilles radicales oblongues et ovales, plus ou moins sagittées à la base, les tiges succulentes, striées, hautes de 70 centimètres environ, paniculées, munies de petites fleurs verdâtres, monoïques ou dioïques, auxquelles succèdent des graines triangulaires, luisantes. Les feuilles et les très jeunes tiges sont les seules parties comestibles dans l'oseille.

Oseille commune

Culture — On sème la graine d'oseille depuis le commencement d'avril jusqu'au mois d'août, par planches larges de 2 mètres 33 centimètres ; ou laboure et dresse ces planches comme à l'ordinaire, et on trace dans chacune d'elles dix rayons à fond plat avec les pieds, et on répand la graine dans toute la largeur du rayon, en prenant garde de la semer trop dru ; ensuite on repasse en glissant les pieds entre chaque rayon de manière à faire tomber la terre de chaque côté dans les rayons semés, et que la graine se trouve couverte ; cette opération faite, on donne un coup de râteau pour niveler la superficie, et on couvre le tout d'un lit de terreau épais de 12 millimètres. Nous plantons toujours six ou sept rangs de romaine grise ou blonde entre les rangs d'oseille, et celle-ci profite des arrosements qu'on est obligé de donner à la romaine, qui est venue et vendue avant de nuire à l'oseille.

La première cueille de l'oseille se fait avec un couteau à 2 centimètres au-dessus du sol ; mais la seconde cueille et les suivantes se font à la main en enlevant les feuilles, l'une après l'autre, avec leur pétiole tout près de la souche, en ménageant les petites feuilles du cœur qui, une quinzaine de jours après, pourront être cueillies à leur tour.

Quoique l'oseille ait une racine pivotante qui la fait résister assez bien à la sécheresse, il est bon de lui donner de fortes mouillures pendant l'été, surtout après la cueille, qui peut se faire tous les quinze jours, jusque dans l'automne. En vieillissant, l'oseille talle et peut vivre très longtemps ; mais nous ne la conservons ordinairement en place qu'une année.

Oseille vierge

Culture — Cette oseille est dioïque, c'est-à-dire qu'elle porte des fleurs mâles sur certains pieds et des fleurs femelles sur d'autres. Depuis longtemps, on ne cultive dans les jardins que des individus mâles, qui, par conséquent, ne produisent pas de graine, d'où est venu le nom d'oseille vierge. Ses feuilles sont plus larges, plus arrondies, d'un vert plus blond, plus appétissant, et moins acides que celles de l'oseille commune. Elle est très propre à former des bordures dans les jardins potagers, parce qu'elle ne répand pas de graines qui salissent les allées ; mais, dans nos marais, nous ne plantons rien en bordure, c'est tout en planche : ainsi, quand on a un vieux plant d'oseille vierge, on l'arrache, on divise les souches des racines, on choisit les parties les plus jeunes, les mieux garnies d'yeux, et on les replante en planche, à 16 centimètres de distance les unes des autres. Cette plantation se fait avec plus de succès en octobre qu'au printemps, et nous ne la renouvelons que tous les quatre ou cinq ans.

Culture forcée de l'oseille

Dès le mois de novembre, dans la supposition que la terre gèlera bientôt et qu'on ne pourrait plus le faire plus tard, on arrache une provision de vieilles souches d'oseille, en ménageant bien les racines, et on la met en. jauge dans un endroit où il soit facile de l'abriter avec de la litière, si la gelée venait à pendre ; on fait de suite ou plus tard, en raison du besoin ou de la spéculation, une bonne couche sur laquelle on place des coffres, et on met dans ces coffres une épaisseur au moins de 16 centimètres de terreau.

Quand la couche a jeté son grand feu, on prend des touffes d'oseille mises en jauge, on les divise si elles sont trop grosses, et on les plante en rigole ou autrement dans le terreau de la couche de manière que toutes les têtes soient à la même hauteur et recouvertes de quelques millimètres de terreau ensuite on met les châssis. Bientôt les feuilles poussent, et on peut' en faire trois cueillettes à quelque distance l'une de l'autre, après lesquelles les plantes sont épuisées.

On peut, pendant tout le cours de l'hiver, réchauffer et faire pousser ainsi non-seulement de l'oseille, mais encore de vieux pieds de persil, de cerfeuil, et quelques autres plantes que la rigueur de la saison tient engourdies.

Potiron

Plante de la famille des cucurbitacées et du genre courge. Il y a plusieurs espèces ou variétés de potiron ; ce sont toutes plantes annuelles, rampantes, à grandes feuilles et à vrilles ; les fleurs sont monoïques, grandes, et il leur succède de très gros fruits charnus, souvent arrondis, ovales, allongés, cannelés, jaunes, verts ou gris, et qui sont la partie comestible de ces plantes.

Gros potiron ou citrouille

Culture — Dans la première huitaine d'avril, on sème la graine de ce potiron sur un bout de couche tiède ; elle ne tarde pas à lever, et, huit jours après., on la repique sur une autre couche en pépinière ; si on a des cloches ou des châssis disponibles, on fera bien d'en couvrir le jeune plant, pour faciliter sa reprise, mais cela n'est pas indispensable ; il suffit de le garantir de la gelée pendant la nuit. Dans la première huitaine de mai, il est bon à mettre en place ; alors on fait, dans le carré qui lui est destiné, des trous larges de 1 mètre carré, profonds de 55 centimètres, dans chacun desquels on met trois hottées de fumier bien tassé que l'on recouvre avec la terre tirée du trou. Il n'y a pas de règle établie pour la distance d'un trou à l'autre ; mais il faut prévoir que la tige d'un potiron s'étendra sur la terre jusqu'à la distance de 4 à 5 mètres dans la direction qu'on lui fera prendre, et cela est suffisant pour placer les trous convenablement : ceci bien compris, on forme une espèce de bassin au milieu de chaque trou, on va à la couche pépinière lever, avec les deux mains, un pied de potiron garni d'une bonne motte, et on vient le planter au milieu du bassin en l'enfonçant - jusqu'auprès des cotylédons ; on l'arrose de suite, et si le soleil luit ou s'il fait du vent, on le garantit de l'un et de l'autre avec un peu de litière sèche, pendant trois ou quatre jours, pour aider à la reprise.

On ne coupe pas la tête au potiron, comme on le fait aux melons et concombres ; on le laisse courir sur terre dans la direction qu'on lui a destinée ; mais il faut l'arroser souvent et abondamment. A mesure que la tige s'allonge, elle pousse des ramifications ou petites branches sur les côtés : notre usagé est de les supprimer pour que toute la sève passe dans la maîtresse tige ; nous sommes aussi dans l'usage, quand cette maîtresse tige est longue de 2 ou 3 mètres, de la marcotter, afin de multiplier les racines. Ce marcottage consiste à ouvrir une petite fosse oblongue, profonde de 16 centimètres, dans laquelle on fait descendre la partie de la tige où l'on veut que les racines se développent ; on l'y maintient par un petit crochet en bois s'il est nécessaire, on replace la terre sur la portion de tige qui est dans la fossette et on arrose. On pratique un second marcottage 65 centimètres plus loin, même un troisième, à mesure que la tige s'allonge. Quand un fruit est noué et qu'il continue de grossir, on juge qu'il tiendra, et, quand il a atteint la grosseur d'une tête d'enfant, on coupe la tête de la branche à deux ou trois feuilles au-dessus du fruit, et, si les arrosements ne manquent pas, on voit le fruit grossir rapidement.

C'est en cultivant de cette manière et ne laissant venir qu'un fruit sur chaque plante, que nous obtenons des potirons du poids de 100 kilogrammes et plus.

Nous devons dire cependant que tous les jardiniers ne procèdent pas de cette manière : il y en a qui laissent venir deux fruits sur le même pied, en lui conservant deux branches ; d'autres ne pratiquent pas le marcottage ; d'autres enfin ne suppriment aucune branche, et ils obtiennent davantage de fruits, mais moins gros. Les potirons se conservent jusqu'en janvier et février, dans un endroit sec à l'abri de la gelée.

Le gros potiron dont nous venons de parler a la chair pâle ; il ne brode pas ordinairement. Nous cultivons aussi :

Nous cultivons peu, dans nos marais, les n° 3, 4 et 5, non que nous ne les trouvions très bons, mais parce que leur consommation n'est pas assez abondante : au reste, la culture que nous avons indiquée pour le gros potiron leur convient amplement ; on peut même la simplifier.

Scorsonère

Plante de la famille des composées, de l'ordre et du genre dont elle porte le nom. Elle est bis ou trisannuelle, originaire d'Espagne ; sa racine est simple, noire en dehors, blanche en dedans, pivotante et fort longue ; les feuilles sont lancéolées, aiguës ; la tige devient haute de 1 mètre, rameuse dans le haut, et chaque ramification se termine par une fleur jaune, com posée, à laquelle succèdent de longues graines aigrettées. La partie comestible de cette plante est la racine ; les feuilles peuvent aussi être mangées.

Scorsonère d'Espagne

Culture — La graine de cette plante se sème à la fin d'avril ou dans les premiers jours de mai, en culture maraîchère ; mais, ailleurs, on peut retarder le semis jusqu'en août, par la raison que nous expliquerons tout à l'heure. Quand on est disposé à semer, on laboure profondément une ou plusieurs planches ; après qu'elles sont dressées, on les sème à la volée et on enterre la graine, en râtelant avec une fourche ; ensuite on la plombe avec les pieds, on y passe le râteau et on y étend 12 ou 15 millimètres de terreau. Quand les planches sont ainsi semées, on y trace, avec les pieds, neuf ou dix rayons, que l'on plante en romaines à la distance de 40 centimètres dans les rangs. L'arrosage que l'on donne aux romaines contribue à accélérer la germination et le développement de la scorsonère. Après que la romaine est enlevée, on désherbe la scorsonère, et elle croît assez rapidement, à la faveur de ses longues racines, qui sont bonnes à arracher et à vendre, par bottes, dans le courant de l'hiver.

Dans la seconde manière de semer, à la volée ou en rayons, la scorsonère occupe la terre dix-huit ou vingt mois ; et cette raison explique pourquoi les maraîchers de Paris ne peuvent plus cultiver une plante qui occupe la terre si longtemps. Semée au mois d'août, la scorsonère monte en graine l'été suivant : lorsque la graine est recueillie, on coupe les tiges, la plante pousse de nouvelles feuilles, la racine grossit, redevient charnue, succulente, et se livre à la consommation l'hiver suivant. Or, comme on obtient dans les campagnes des environs cette scorsonère à moins de frais que nous ne pourrions l'obtenir dans nos marais, et comme elle se vend en même temps que celle que nous aurions pu semer au printemps, la concurrence a forcé presque tous les maraîchers de l'intérieur de Paris à renoncer à la culture de la scorsonère.

Observations — Cette plante, ainsi que le salsifis, que nous ne cultivons pas, nous suggère une question dont nous laissons la solution aux savants : tant que les racines de ces plantes sont jeunes et jusqu'à ce qu elles montent en graine, elles sont tendres, charnues et se cassent très facilement ; à mesure qu'elles montent en graine, elles deviennent dures, coriaces, filandreuses et ne se cassent plus. Quand la graine est récoltée, que les tiges sont coupées, les racines poussent de nouvelles feuilles, et ces mêmes racines redeviennent tendres, charnues, cassantes, succulentes comme avant de monter en graine.

Or nous demandons aux savants ce que sont devenues ces grosses fibres qui s'étendaient dans toute la racine, qui la rendaient coriace, incassable au temps de la fleuraison et de la fructification.

Panais

Plante de la famille des ombellifères, de l'ordre des peucédanées et du genre dont elle porte le nom. C'est une plante indigène, dont la racine est simple, pivotante, fusiforme, la tige haute de 1 mètre, les feuilles longues, ailées, à folioles larges, lobées ou incisées ; les fleurs sont jaunes, petites, disposées en ombelles, auxquelles succèdent des fruits elliptiques, comprimés. La partie comestible de cette plante est la racine.

Les maraîchers de Paris font fort peu de panais, parce que son usage est très circonscrit dans la cuisine parisienne ; on ne s'en sert que pour donner du goût au potage.

Culture — On sème le panais à la fin d'avril, comme beaucoup d'autres plantes, quand il n'y a plus de forte gelée à craindre ; mais on peut en semer plus tôt en côtière, en y plantant de la romaine dès la fin de février. Quand on le sème en plein carré en avril, et en planches préalablement labourées et dressées, il faut le semer assez clair, parce que ses racines deviennent grosses et ses feuilles grandes. Après que la graine est enterrée à la fourche et plombée avec les pieds, on peut semer, par-dessus, des radis ou des épinards, plantes qui n'occupent pas longtemps le terrain, ou y planter de la romaine, à huit ou neuf rangs par planche.

Dès que le panais est gros et grand comme une rave, on peut commencer à en porter à la halle et continuer jusqu'en mars, époque où toutes les racines commencent à monter en graine et durcir.