BESOINS ALIMENTAIRES DES ARBRES FRUITIERS PAR HA/AN

(d’après la composition des tissus)

Élément par ha/an Remarques
CO2 28 000 à 10 000 kg
H2O 2 000 à 7 000 kg (non compris l’eau évapotranspirée, évaporée)

ÉLÉMENTS TERNAIRES TIRES DE L’ATMOSPHÈRE

Élément par ha/an
C, H, O 10 000 à 17 000 kg

ÉLÉMENTS MINÉRAUX TIRES DE LA FERTILITÉ DU SOL :

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Élément en kg par ha/an
N (Azote) 120 à 200
Potasse (K20) 150 à 250
P2 O5 60 à 120
CaO 50 à 100
SO2 15 à 40
MgO 20 à 30
Fer 0,4 à 1
Zinc 0,2 à 0,3
Manganèse 0,1 à 0,2
Bore 0,07 à 0,1
Cuivre 0,4 à 0,6
Molybdène 0,02

Total minéraux : 500 à 800 kg/ha/an.

N.B : attention aux carences et aux excès Le PH est à considérer.

Carence en bore et intoxication par l’alumine dans les terres trop acides.

Blocage du zinc, du manganèse, et du fer en sols alcalins.

Un excès de phosphore peut provoquer des carences en zinc et en cuivre ou gêner l’assimilation de l’azote.

Un excès de potasse perturbe l’alimentation de la plante en magnésie, en chaux et en bore.

Une insuffisance d’eau cause une sous-alimentation générale.

Une mauvaise structure du sol (battance, semelle de labour) de même qu’un sous-sol imperméable asphyxiant sont défavorables à la circulation de l’eau dans le sol et sont une cause fréquente de la malnutrition des vergers : dénitrification lorsque le verger est inondé, asphyxie etc. et problème de circulation de sève, ralentissement du métabolisme à cause de la sécheresse en été.

Veiller à l’équilibre C/N = aménager un espace suffisant entre les arbres, favoriser la vie microbienne productrice de CO2 + N et faire attention à la faim d’azote printanière.

IL FAUT NOURRIR LES MICRO-ORGANISMES EN IMITANT LA Nature

C’est-à-dire avec les déchets organiques animaux et végétaux, qui seront apportés frais à la surface du sol par la biomasse déchétuaire (feuilles, herbes fauchés, racines, etc.) ou bien alors sous la forme d’un composte mûr épandu en surface.

Quant aux autres substances minérales dont ils ont besoin pour former leur organisme (chaux, magnésie, potasse, fer, souffre, phosphore, oligo-éléments...) ils les extraient eux-mêmes des cristaux d’argiles, du feldspath, des schistes...

Quant aux sols sableux, très pauvres, il vaut mieux les amender avec du limon et une couverture permanente d’engrais vert (lupin...) plutôt que d’apporte de la potasse.

DANS LE VERGER, ON NE MÉLANGERA PAS LE COMPOST AVEC LE SOL

On laissera le compost en surface, même s’il est mûr : dans la couche supérieure du sol se trouvent de fines radicelles qu’il est préférable de ne pas déranger. Par conséquent, on épandra directement sur le sol le compost non tamisé, même s’il contient des particules ligneuses grossières encore mal décomposées, (mais il faut éviter de laisser le compost se dessécher) il sera donc protégé par un mulch de feuilles mortes et d’adventice fauchées, imitant en cela le sol de la forêt. Le compost mûr sera épandu de préférence en automne, lorsque le sol est encore suffisamment chaud, ou bien au printemps, mais en attendant que le sol soit suffisamment réchauffé.

Donc le compost épandu en surface sera recouvert d’une bonne couche de feuilles et d’herbes fauchées (ou de la paille) haute comme la main : mais pendant l’hiver une couche plus mince est préférable si on a peur d’attirer les campagnols, et pour que le sol se réchauffe plus vite au printemps.

La couverture d’herbes fauchées qu’on mulche sur le sol du verger protège le composte et l’humus, conserve l’humidité et protège le sol contre le vent, le soleil et le dessèchement. Cependant, son rôle principal est de nourrir et de protéger les micro-organismes. C’est pourquoi cette couverture peut être assez épaisse en été, où d’ailleurs elle disparaîtra remarquablement vite, si le sol a une bonne activité microbienne.

L’épaisseur du mulch sera moins grande en hiver, afin d’éviter de donner abri aux mulots et campagnols, et aussi pour permettre au gel d’ameublir les terres argileuses...

Le mieux, c’est d’effectuer les apports de compost en automne, afin que les arbres puissent faire face à la faim de N printanière de l’année suivante avec succès et ce compost devra recevoir une mince couche d’herbes fauchées et de feuilles. Lorsque le sol des terres voisines laissées nues est déjà bien gelé, celui du verger recouvert de mulch est toujours vivant.

Ce système est beaucoup plus efficace que le système traditionnel d’enfouissement du compost à la charrue ou même aux disques où à la herse : il est impossible de mélanger du compost à une terre trop humide... sinon on fabrique du béton et l’air ne pouvant plus entrer, le résultat en est la putréfaction. Quand la terre est trop sèche, il y entre trop d’air, d’où gaspillage de l’humus... si bien qu’on est contraint de différer l’apport du compost, tant que l’état du sol ne le permet pas...

Quant à enfouir du compost frais dans le sol, cela donnera des poisons réducteurs : de l’ammoniaque au lieu du nitrate, du phosphore d’hydrogène au lieu des phosphates, des sulfites au lieu des sulfates... ce sont des poisons qui affaiblissent la vie microbienne et les cultures, c’est ainsi que l’on récolte des parasites.

La fumure organique doit être épandue en surface (mulch) et cela d’autant plus qu’elle est fraîche.

Les vignes sont souvent situées sur les versants où le sol est particulièrement exposé au danger d’être emporté par les eaux pluviales (érosion hydrique) d’autant plus que le défoncement a appauvri sa teneur en humus...

Au même titre que les vergers, le vignoble permet la pratique d’engrais verts (ensemencés et associés aux adventices) dont il vaut mieux composter en surface la masse végétale fauchée, plutôt que de les enfouir dans le sol par un labour.

LES FAÇONS PROFONDES : Labours, sous-solage, etc.

Ils sont particulièrement nuisibles pendant les périodes actives de la végétation dans les vergers, et surtout durant la floraison et la nouaison qui correspondent à des appels alimentaires intensifs.

L’ENFOUISSEMENT DES ENGRAIS VERTS AU PRINTEMPS

Le « bon » labour de printemps, est souvent la cause d’importantes chutes de fruits, qu’on attribue volontiers à des intempéries, notamment au vent. La partie la plus active du chevelu racinaire est ainsi détruite à la veille d’une époque où l’arbre fruitier en a particulièrement besoin pour soutenir l’effort alimentaire demandé par la floraison et la nouaison.

AFIN DE RÉDUIRE LA CONCURRENCE ENTRE LES ARBRES FRUITIERS ET LES ENGRAIS VERTS

Ils seront fauchés avant la floraison des arbres, au printemps, époque où les besoins en éléments fertilisants atteignent leur maximum des 2 côtés. L’herbe fauchée sera mulchée.

LA FAIM D’AZOTE PRINTANIERE

Qui est également bien connue des céréaliculteurs, s’observe également dans les vergers : les fleurs et les jeunes fruits contiennent des quantités énormes de N P K. La floraison et la végétation de printemps entraîne une consommation de près de la moitié de la ration annuelle en azote... et à ces appels impérieux, viennent s’en adjoindre d’autres : en effet, chez les espèces à feuilles caduques, la différenciation des fleurs dans les bourgeons s’opère aussitôt après la nouaison. Il est donc évident que la moindre déficience en azote à cette période influencera de façon défavorable la production de l’année suivante, l’arbre alimentant en priorité la récolte pendante, au détriment de celle de l’année suivante.

C’est la meilleure explication qui peut être donnée sur le phénomène de l’alternance des récoltes d’une année à l’autre.

Parallèlement, le sol en est à son point le plus bas lorsque les besoins des arbres fruitiers atteignent leur maximum, on a enregistré des teneurs en azote dans le sol de 5 à 20 fois moins élevées en mars qu’en août.

Il en résulte un profond déséquilibre entre les besoins des arbres et les ressources du sol en azote, ce qui est à la base de nombreux accidents de nouaison, notamment de la chute des jeunes fruits en juin.

De nombreuses observations pratiques viennent à l’appui de cette théorie.

Cette faim d’azote printanière s’observe aisément dans les orangeries, où le feuillage prend une teinte jaunâtre à chaque printemps, en l’absence d’une fumure appropriée.

Les arbres qui coulent le plus facilement sont ceux dont la floraison est particulièrement abondante, comme le clémentinier.

L’espèce qui donne la fructification la plus régulière, le néflier du Japon, fleurit à l’automne à une époque où la teneur en azote du sol en est à son maximum.

En culture classique, la fumure printanière présente donc une importance capitale, et constitue l’un des moyens les plus efficaces d’augmentation des rendements, notamment ceux des cultures méditerranéennes... la température relativement élevée de la zone méditerranéenne est un puissant facteur de destruction de l’humus. La fumure de printemps représente environ la moitié de la ration annuelle...

(Fumure pré-florale, apportée au début du printemps).

PAR SON APPORT D’HUMUS, LA MATIÈRE ORGANIQUE AMÉLIORE NETTEMENT LES QUALITÉS PHYSIQUES DU SOL

Elle procure l’azote nitrique d’une manière très échelonné, favorise la mobilité du phosphore et fournit des hormones de croissances particulièrement précieuses pour les jeunes arbres.

Pour éliminer la faim d’azote printanière : cultiver les arbres fruitiers en association avec les légumineuses pluriannuelles, (trèfle blanc, luzerne, sainfoin etc.)

Les arbres fruitiers seront plantés peu serrés.

La couverture du sol (engrais verts et adventices) sera fauchée régulièrement et la végétation fauchée sera laissé à la surface du sol (mulch).

Si possible, effectuer des apports de compost, (ou compostez au pied des arbres sous mulch, toute matière végétale).

Ne jamais labourer ou biner le sol.

La non culture du sol, ainsi que le couvert végétal permanent (mulch et engrais verts) favorisent l’infiltration des eaux dans le sol parce qu’en diminuant l’évaporation, ils empêchent la formation d’une croûte de battance de sels minéraux à la surface du sol et ils empêchent l’encroûtage du sol dû aux pluies (choc des gouttes sur le sol).

La non-culture du sol et le couvert végétal permanent améliorent la perméabilité du sol.

N.B : les façons profondes (labours, etc.) sont particulièrement nuisibles pendant les périodes actives de la végétation et surtout durant la floraison et la nouaison qui correspondent à un appel alimentaire intensif.

La nécessité d’assurer une bonne alimentation aérienne et souterraine (C et N) constitue, de loin, l’élément le plus important. Les arbres trop serrés se gênent mutuellement, au niveau des racines et des frondaisons, résultat : faim de soleil (C) et en définitive faim d’azote printanière (N).

L’équilibre C/N

À une alimentation souterraine abondante N doit correspondre une grande activité du feuillage que seuls des écartements suffisants peuvent assurer.

La lumière du soleil est indispensable à l’assimilation du carbone qui entre pour les 2/5 dans la composition des sucres et l’insuffisance de carbone (de soleil) retentit donc fâcheusement sur la qualité des fruits.

C =
Activité aérienne, travail des feuilles, sève élaborée riche en C (sucres).
Volume et qualité de la fructification.
N =
Activité souterraine, travail des racines.
Sève brute, riche en N + H2O + minéraux.
Vigueur de la végétation.

Un certain équilibre doit exister entre ces 2 modes d’alimentation.

Au début de sa croissance l’arbre développe son feuillage. Construction de l’usine. La nutrition par les racines l’emporte sur l’activité du feuillage : ne surtout pas tailler, pour ne pas accentuer un déséquilibre défavorable à la mise à fruit : pas de taille de formation.

À l’âge adulte, la nutrition C/N est bien équilibrée. Pas de taille. L’arbre travaille à plein, la fabrique reçoit en abondance matières premières N et force motrice C

Quand survient la décrépitude, l’activité radiculaire s’affaiblit : la matière première N fait défaut, l’usine tourne à vide... c’est alors qu’on peut faire des élagages sévères, puis des tailles de rajeunissement.

Pour ce qui est de l’azote N, l’apport annuel de 5 à 20 t de fumier de ferme/ha (fumier frais composté en surface) constitue un idéal qu’il est rarement possible d’atteindre, les cultures maraîchères disputant aux vergers les maigres ressources disponibles.

L’azote, pivot de la fumure est une notion classique qui prend toute sa valeur sous climat méditerranéen, où la combustion de la MP s’effectue avec rapidité. Cet inconvénient est d’autant plus sensible qu’un ensoleillement généreux favorise l’assimilation du carbone, d’où le danger d’un déséquilibre C/N. D’autre part, les précipitations concentrées sur un temps relativement court occasionnent des lessivages générateurs d’importantes pertes de N ; tandis que l’irrigation entraîne une consommation effrénée de cet élément.

Par conséquent, couverture permanente du sol par des engrais verts mêlés d’adventices :

N.B : Répétons-le : NE JAMAIS ENFOUIR L’ENGRAIS VERT PAR UN LABOUR, qui au printemps, détruit la partie la plus active du chevelu racinaire à la veille d’une époque où l’arbre en a particulièrement besoin pour soutenir l’effort alimentaire demandé par la floraison et lanouaison, et accomplit ainsi un véritable travail de pénélope, annulant les résultats d’une technique par ailleurs excellente.

ATTENTION ! COUVERTURE PERMANENTE DU SOL NE SIGNIFIE PAS : ENGAZONNEMENT. Le gazon concurrence trop souvent l’arbre, notamment au printemps, où les besoins atteignent leur maximum des 2 côtés.

Le mythe de l’azote

Qui en favorisant trop la croissance à bois inhiberait la production des arbres fruitiers : c’est une farce du 1er avril.

Ce concept est beaucoup trop répandu dans les milieux de l’agriculture bio ou même chimique. Il ne faut pas croire que les engrais vert fixateurs de N risquent de bloquer la production fruitière des arbres lorsqu’ils sont cultivés en association sous couvert des vergers... cette conception est tout à fait aberrante et il est très fréquent, bien au contraire, que les vergers souffrent de la faim d’azote printanière pendant leur floraison.

On prétend aussi que l’excès d’azote retarde la mise à fruit : il y a du vrai, parce que les arbres soumis à de très fortes fumures N vont en priorité pousser à bois et former leur charpente, mettant ainsi à profit leur excédent de vigueur pour leur croissance végétative, ce qui est tout à fait normal pour de jeunes arbres...

Notons aussi qu’en fait, la production n’en sera que très faiblement différée. Il suffit de visiter les champs d’expérimentation de l’INRA pour s’en convaincre, mais bien entendu à condition que les arbres aient été plantés à écartement suffisant : plus que l’excédent de N, c’est le déséquilibre du rapport C/N, à savoir la faim de C, qui est dangereuse.

C’est ainsi que l’on voit, sur des parcelles surfumées en N chimique (de l’INRA) des pommiers en forme libre, bien distancés, de grande vigueur, greffés sur franc, très productifs, et où l’on voit des sujets encore jeunes, à l’âge de 10 ans, donner déjà 350 à 420 kg de pommes/arbres. (Avec 100 arbres/ha, espacés de 10 x 10 m en quinconce ; il faut évidemment beaucoup d’azote pour que de tels arbres, à cet âge, et qui sont encore en pleine croissance, puissent déjà donner de telles quantités de fruits.

Ces vergers expérimentaux donnant en moyenne 25 à 30 t de fruits/ha, à l’âge de 10-12 ans... avec mulching permanent de pailles etc., et sur sol non travaillé.

NB : les fruits à pépins sur franc (pommiers ou poiriers) ne deviennent adultes qu’à 25-30 ans.

On a trop longtemps considéré l’azote en France et à l’étranger, sinon comme nuisible, tout au moins comme d’un emploi délicat en arboriculture, l’accusant d’entraver la mise à fruit et de faire pousser des feuilles et des gourmands au lieu d’assurer les récoltes.

En fait, l’azote ne nuit pas à la floraison des bourgeons à fleurs, comme on l’entend dire trop souvent : bien au contraire, il favorise la floraison des pommiers et surtout la nouaison des jeunes fruits : mais il faut pour cela qu’il soit utilisé assez tôt.

Ceci est encore plus net avec les variétés très fertiles comme golden delicious, reine des reinettes... la récolte des arbres augmente chaque année même avec une fumure (N) nulle, mais elle est beaucoup plus importante, et surtout plus stable, sans alternance avec des fortes fumures (N).

Rendement moyen/arbre (pommiers sur francs), variété : Boskoop, Reine des reinettes, Golden :

Âge des arbres (années) Parcelle témoin
pas de N
Parcelle fortement fumée
200 unités N (pur)/ha
8 - 10 141 kg 256 kg
9 – 11 144 kg 374 kg
10 - 12 364 kg 365 kg